La piste du drame familial se confirme à Nantes
Les enquêteurs recherchent activement Xavier Dupont de Ligonnès, dont la présence a été signalée dans le Var mi-avril. Étrange coïncidence, selon le procureur: une femme a disparu dans ce département à la même date.
Les enquêteurs tentent de retrouver la trace de Xavier Dupont de Ligonnès, l’homme dont l’épouse et les quatre enfants ont été découverts assassinés jeudi dans leur résidence familiale de Nantes, en concentrant leurs recherches sur le Var où sa voiture a été retrouvée.
Une patrouille de gendarmerie a repéré dans la nuit de jeudi à vendredi le véhicule de Xavier Dupont de Ligonnès sur le parking d’un hôtel de Roquebrune-sur-Argens, dans le Var, où la famille avait résidé avant de s’établir en Loire-Atlantique. La police judiciaire a emporté la voiture pour procéder à son examen technique.
La famille Dupont de Ligonnès était portée disparue depuis le début du mois d’avril.
Les corps d’Agnès Dupont de Ligonnès, 48 ans, et de son fils Thomas, 18 ans, ont été autopsiés vendredi matin. L’autopsie révèle qu’ils ont été atteints chacun de deux balles à la tempe, probablement par une carabine 22 Long Rifle. Le père de famille possédait une telle arme.
Les corps des trois autres victimes – Arthur, 20 ans, Anne, 16 ans, et Benoît, 13 ans – devaient être autopsiés cet après-midi.
Avant leur disparition, Xavier Dupont de Ligonnès avait expliqué, dans une lettre adressée à des proches, être “un agent secret pour le compte des Etats-Unis” et avoir été contraint d’assister à un “important procès lié à la drogue”. Son épouse avait pour sa part évoqué une soudaine “mutation en Australie”.
Selon le quotidien Presse-Océan, un huissier avait été mandaté le 5 avril pour venir réclamer “une créance de plus de 20.000 euros” au domicile de la famille, qui aurait été confrontée à des difficultés financières.
Loin du coup de folie, les enquêteurs penchent pour l’hypothèse d’un scénario méticuleusement préparé à l’avance, selon des informations obtenues sur place: le bail de la maison avait été résilié, des lettres adressées aux amis et à la direction de l’école pour les prévenir du départ de la famille.
Dans l interview d’un voisin sur RTL, le père de famille a été vu “il y a quinze jours (…) avec de gros sacs, de gros cabas”. D’après ce témoin, il faisait des allers et venues entre son domicile et le coffre de son véhicule. Le père “est en vie puisque je l’ai vu après la disparition”, affirme un autre habitant du quartier. Deux nuits durant, les chiens du couple – deux Labrador noirs – auraient “hurlé à la mort”, intriguant le voisinage.
Une “coïncidence” avec une disparition dans le Var
Le procureur de Nantes a évoqué vendredi une “coïncidence entre la date de passage” mi-avril dans le Sud-Est de Xavier Dupont de Ligonnès et “la disparition” d’une femme, Colette Deromme, le 14 avril dans le Var. Mais “rien à ce jour” n’est encore établi, a ajouté le procureur de la République de Nantes, Xavier Ronsin avant de préciser: “La famille Dupont de Ligonnès a habité avant 2003 (dates non encore établies de manière certaine) le village de Lorgues dans lequel résidait Mme Deromme”.
Une famille sans histoire
Cette famille n’avait plus donné de nouvelles depuis le 4 avril. Les parents et leurs quatre enfants, Thomas, 21 ans, Arthur, 18 ans, Anne, 16 ans et Benoit 13 ans, habitaient une maison à étage en pierre grise située boulevard Schumann. La maison où les corps ont été découverts. Après avoir vécu à Versailles, puis dans le Var et à Pornic, le couple s’était installé à Nantes.
Agnès, la mère, une femme aux cheveux gris âgée de 49 ans, est surveillante dans un établissement scolaire catholique et enseigne le catéchisme. Le père, Xavier, 50 ans, est gérant d’une petite société à Pornic: commercial, il s’occupe d’espaces publicitaires.
Les voisins parlent d’une famille ordinaire. “C’était pas des gens qui se faisaient remarquer, ils n’avaient pas de profil atypique”, témoigne un agent immobilier installé à proximité du domicile familial. “On est sous le choc. Le monsieur était client chez nous, la dernière fois qu’il est venu, c’était il y a un mois environ”, raconte la coiffeuse du quartier. La patronne du quartier voisin “les voyait tous les jours” mais “ne les connait que de vue”. A peine a-t-elle remarqué que la voiture utilisée quotidiennement par la mère “n’avait pas bougé depuis dix jours”.
Pourtant, avant de disparaître, les parents ont laissé des messages délirants et contradictoires, a déclaré lors d’un point presse le procureur de la République de Nantes, Xavier Ronsin. A certains proches, le père de famille aurait même “expliqué qu’il était agent secret et qu’il partait dans le cadre d’un programme de protection de témoins”.
Le directeur de l’établissement scolaire où étaient scolarisés les deux plus jeunes enfants du couple, a reçu, il y a une dizaine de jours, un courrier pour le moins étrange. Dans cette lettre, les parents évoquent une “mutation professionnelle urgente” en Australie. “Ce courrier était accompagné d’un chèque pour solde de tout compte jusqu’à la fin de l’année”, précise le principal.
Un périmètre de sécurité a été établi ce jeudi autour de la voiture de la mère de famille qui a disparu.
Selon le procureur, aucune trace de lutte ou de violence n’a dans un premier temps été constatée au domicile où toutes les armoires ont été vidées. Le père vu avec de gros sacs, de gros cabas. La Golf appartenant vraisemblablement à la mère et garée non loin de la maison éveille aussi la curiosité des enquêteurs. Dans le pollen qui s’est déposé sur le véhicule ont été tracés à la main les mots suivants: “T’avais pas le droit. Tu nous manques. PK”.
Un appel à témoins a été lancé par les enquêteurs. Toute personne susceptible d’avoir une information est priée d’appeler le: 02 53 46 74 20.
Photos de la famille Dupont de Ligonnes : Xavier, 50 ans, Agnès, 49 ans, Arthur, 20 ans, Thomas, 18 ans, Anne, 16 ans et Benoît, 13 ans.