L’occasion pour la patronne de l’ARS de s’exprimer sur la santé dans les îles du Nord. Deux îles qui, avec la Guadeloupe, intéressent Valérie Denux qui vient régulièrement dans les îles du Nord pour s’occuper des problématiques de ces deux territoires, et travailler en lien avec les acteurs de santé locaux.
Pour Valérie Denux, l’aspect reconstruction suite à Irma et le point de situation des acteurs de santé du post-Irma font partie du premier aspect qui motivent sa venue sur l’île. « Nous avons l’hôpital de Saint-Martin qui a repris son activité à 100% depuis le mois de février 2018. Il a été quasiment finalisé, si ce n’est le toit qui est en fin de rénovation pour fin septembre. Il va y avoir aussi le Centre médico-psychologique qui va emménager au-dessus du Mac Donald dans les prochains jours ».
L’EHPAD « une structure qui est vieillissante, et qui était déjà abîmée, est dans une situation un peu différente parce qu’il y a eu des travaux de rénovation, mais étant donné qu’il a été fragilisé structurellement, il demande plus de temps de consolidation ». Il y a un projet de reconstruire l’établissement à La Savane dans le cadre d’un Pôle médico-social en lien avec la Collectivité. Le Pôle médico-social « est une compétence partagée entre la Collectivité et l’ARS, donc il faut qu’on se mette bien d’accord. Et mon souhait, c’est que l’on tombe d’accord sur le cahier des charges d’ici à la fin de l’année pour qu’on soit en mesure de lancer l’appel d’offre en début d’année 2019 », considère la directrice générale de l’ARS.
Un Pôle médico-social d’ici deux ans ?
Tout en affirmant, d’une voix posée, que « si on n’y arrive pas, il faudra que l’on change de portage. Il va falloir que l’on réfléchisse comment on va faire, parce que je ne veux pas attendre quelque chose pendant des années et des années. L’état de l’EHPAD, actuellement, n’est pas acceptable ». Toutefois Valérie Denux a quand même bon espoir que « l’on aboutisse sur cet appel d’offre et que l’on voit sortir ce Pôle médico-social de terre dans les deux prochaines années », mais « on fait des groupes de travail. On s’est rencontré et l’on est en train de travailler. Au mois d’octobre, l’on va aborder ce sujet avec le président de la Collectivité. J’ai plutôt bon espoir, mais je ne vais pas laisser traîner les choses… ».
En ce qui concerne les médecins libéraux, « six médecins généralistes ont quitté l’île. Mais la population a diminué aussi, donc pour l’instant on n’est pas en tension dans l’offre et la demande de médecine générale ». Pour ce qui est des pharmacies, la dernière qui n’avait pas rouvert à Grand-Case devrait le faire ce mois-ci, ainsi toutes les pharmacies de l’île auront repris leur activité.
Des associations dynamiques dans le domaine de la prévention
Le second aspect de sa venue sur l’île est de réfléchir, avec les acteurs de santé, sur la modernisation du système de santé. « Réfléchir ensemble comment on peut faire en sorte de répondre mieux aux besoins de la population. Peut-être travailler beaucoup plus en équipe de territoires, en lien avec Saint-Barthélemy et puis en collaboration avec la Guadeloupe, voire la Martinique, en fonction des compétences demandées ».
Il y a des associations « qui sont très dynamiques et qui fonctionnent bien dans le domaine de la prévention. Mais il faut qu’on intègre leurs actions dans une réflexion un petit peu plus globale de la prise en charge des filières de prise en charge, de façon à pouvoir créer une dynamique de prévention tout au long de la chaîne de prise en charge ».
Valérie Denux se déclare optimiste, même s’il y a un travail important à faire « dans le cadre de la précarisation qu’a générée Irma, dans le cadre de la prévention et de la prise en charge dans le domaine psychologique. Parce que des personnes ont été atteintes. Il y a eu des traumatismes psychologiques suite à Irma ».
Après le cyclone, l’ARS, l’hôpital, en lien avec la Martinique et les psychologues du territoire, ont mis en place une prise en charge du syndrome post-traumatique et du suivi psychologique. « Maintenant, on a besoin de développer l’aspect psychiatrique sur le territoire. On est un peu pauvre en psychiatrie. On a quelques difficultés », estime Valérie Denux.
Une prolifération de moustiques dans certains quartiers
Concernant l’aspect risques sanitaires, après Irma il y a eu un travail qui a été fait sur l’environnement, notamment, par l’antenne de l’ARS de Saint-Martin, afin d’éviter les épidémies. « Ils ont lutté contre les moustiques, qui étaient potentiellement favorisés par les gravats et les détritus. Ils ont aussi lutté contre la prolifération des mouches et contre la prolifération des rats ». Un travail qui a été efficace « puisqu’il n’y a pas eu de problèmes épidémiques, soit dans le domaine des cas de dengue ou de chikungunya, pas plus que d’épidémie de type leptospirose ».
S’il n’y a pas d’inquiétude épidémique, « il y a une prolifération de moustiques dans certains endroits de l’île, qui est très importante. On lutte en permanence contre ça, mais comme il reste encore des détritus, des gravats sur l’île, ça favorise les gîtes larvaires et le développement des moustiques ».
L’ARS surveille l’émanation des gaz produits par les sargasses
Sur le plan des sargasses, l’ARS n’est pas du tout responsable de la gestion de cette crise en termes de ramassage et d’évacuation. « Ce n’est pas de notre domaine », précise Valérie Denux, « c’est la Collectivité qui est en charge de ça, en lien avec la préfecture. Mais à partir du moment où les sargasses ne sont pas évacuées suffisamment tôt, nous surveillons l’émanation des gaz ».
Que ce soit l’hydrogène sulfuré ou l’ammoniaque, « nous vérifions que les seuils de ces gaz sont compatibles avec une absence de risque sanitaire. Nous faisons des mesures sur les tas ou à proximité des habitations, selon les recommandations du Haut Conseil de Santé Publique, dont le rapport est sorti début juillet 2018 et nous suivons cette méthodologie ».
S’il y a des points de discussion avec des personnes qui font des mesures à titre personnel et qui trouvent des chiffres différents de l’ARS, Valérie Denux précise qu’il y a « un étalonnage qui est fait par des professionnels, des gens qui sont ingénieurs sanitaires. Si l’étalonnage n’est pas bon, ça biaise complètement les résultats. Je n’ai absolument pas intérêt à dire qu’il y a des seuils bas, alors qu’il y a des seuils élevés… ».
Marc Banyuls