la défense met en cause le comportement de la victime
PARIS — Les avocats de deux pompiers mis en examen dans l’enquête sur des violences et un viol sur des sapeurs-pompiers de Paris ont mis en cause dimanche le comportement de la principale victime avant et pendant les faits le 6 mai dans un autocar.
Dans cette affaire qui secoue la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), son commandement a suspendu de leurs fonctions tous les militaires mis en examen, une “mesure administrative conservatoire dans l’attente d’une décision de justice ou disciplinaire”, selon le lieutenant-colonel Pascal Le Testu, porte-parole de la BSPP.
Douze pompiers ont été mis en examen et l’un d’eux a été incarcéré vendredi soir, a annoncé samedi une source judiciaire.
La scène de violences est survenue au cours d’une séance de bizutage dans un autocar qui ramenait dimanche dernier l’équipe spéciale de gymnastes de la BSPP d’une compétition à Colmar (Haut-Rhin). Deux engagés ont porté plainte dont l’un pour viol.
Mais deux avocats de pompiers mis en examen ont fait part dimanche à l’AFP de leur perplexité face au comportement de la principale victime.
“Nombre d’éléments au dossier, dont des témoignages et un message, montrent que l’intéressé a annoncé plusieurs semaines à l’avance qu’il allait susciter un incident et l’utiliser pour faire pression sur sa hiérarchie”, a déclaré Me Thibault de Montbrial, avocat de l’entraîneur de l’équipe mis en examen pour non empêchement de crime ou délit.
“Le principal plaignant indique dans un SMS en avril qu’il planifie de porter plainte pour le bizutage à venir”, a confirmé Me Philippe Goossens, avocat d’un autre pompier non gradé.
“Deux témoins affirment en outre qu’il prévoyait de faire pression sur sa hiérarchie pour éviter son éviction de l’équipe dont l’effectif devait être réduit”, a-t-il ajouté.
Selon les deux avocats, le plaignant a fait filmer la scène de violences avec son propre téléphone portable confié à un ami.
Immédiatement “après les faits, il ne s’est pas plaint particulièrement de ce qui s’est passé au fond du (car), ni auprès de ses camarades, ni de sa hiérarchie”, a affirmé Me de Montbrial.
“Sans entrer dans l’analyse des faits, des éléments au dossier permettent de se poser des questions vis-à-vis de la victime”, a estimé Me Goossens, tout en soulignant que cela ne “rend pas pour autant intelligent le bizutage” et en ne se prononçant pas sur le viol présumé.
Son confrère Thibault de Montbrial s’est également insurgé face à des accusations de connivences entre gendarmes chargés de l’enquête et certains pompiers lors des gardes à vue. “Il est parfaitement déplacé de parler de pompiers comme de la mafia et de prétendre qu’a existé une prétendue collusion entre pompiers et gendarmes, comme l’a fait l’avocat des parties civiles”, a-t-il dit.
Ce dernier, Me Nicolas Cellupica, n’était pas joignable dimanche soir. “Dans cette affaire, vous avez deux victimes et une dizaine de bourreaux, alors n’inversons pas les rôles, ne jouons pas à ce jeu-là”, avait-il dit samedi.
De son côté, le commandement de la BSPP a annoncé que la suspension des mis en examen avait été décidée au vu des avancées de l’enquête. Parallèlement à l’enquête judiciaire, le commandement de la brigade mène une enquête interne.
“Il est important, compte tenu de la gravité des faits, que les enquêteurs puissent faire leur travail dans la sérénité”, a souhaité le porte-parole.
Le lieutenant-colonel Le Testu a par ailleurs démenti “formellement toute complaisance du commandement vis-à-vis du bizutage, des actes humiliants et dégradants”.
“Le bizutage est contraire à nos valeurs, il est strictement interdit par le commandement et tout manquement est lourdement sanctionné”, a-t-il ajouté.
AFP – Etienne FONTAINE