Saint-Martin. I am from here ! Cela ne s’auto-suffit pas, cela s’assume aussi…

Des racines… et des ailes !

Hier, Jeudi 9 Janvier, se déroulait la cérémonie des vœux de la Présidente et de ses Vice-présidents à l’Hôtel de la Collectivité, un moment attendu car on y espérait un peu de politique générale, un soupçon d’éclairage quant aux grands axes et objectifs de la gouvernance.

Libérée de toute contrainte temporelle ou fonctionnelle, mais aussi de toute obligation de réserve ou de respect du protocole depuis la démission du Sénateur Fleming, c’est donc drapée de mon unique citoyenneté que j’ai décidé d’y assister ; parce que mon intérêt pour la chose publique est avéré, et parce que la faiblesse de l’activité parlementaire et politique depuis le changement de majorité territoriale m’a laissé le loisir d’observer et de poser quelques constats. Mais cette phase d’observation ne peut durer éternellement et elle est aujourd’hui terminée… de fait !

Au nom de l’amour de Saint-Martin…

La Présidente a conclu son discours en affirmant fermement sa foi en le potentiel de Saint-Martin et sa détermination à travailler pour que celui-ci soit mis en valeur parce qu’elle “aime Saint-Martin, et doit l’aimer encore plus” (que ces autres qui viennent d’ailleurs et en tombent amoureux). La politique par amour de son pays… Il n’en fallait bien évidemment pas plus pour titiller ma fibre saint-martinoise …

En fait… si ! Il m’en fallait un peu plus… Il me fallait tourner la tête vers le panel de journalistes, qui ont d’ailleurs à plusieurs reprises eu droit à quelques commentaires bien placés et légèrement piquants dans les allocutions du Vice-Président Arnell et de la Présidente Hanson. Et là, permettez-moi une digression qui ne modifiera en rien la face de Saint-Martin mais fait partie de ces détails qui façonnent l’image et donc la considération à laquelle on peut prétendre. Sans être une Ayatollah du protocole et de la bienséance, il m’est apparu pour le moins incongru de voir quelques dames lettrées venir assister à la cérémonie des vœux de la Présidente du Conseil territorial de Saint-Martin chaussées de tongs de plage ? Sachez, Mesdames, en tous cas que ces strings des pieds ne sauraient refléter quelque respect tant pour le lieu que pour les personnes qui y siègent…

Quoiqu’il en soit, la situation politico-économique de Saint-Martin est autrement moins futile et les constats et commentaires qui l’accompagnent me transpercent au quotidien parce que moi aussi … j’aime Saint-Martin.

Et parce que j’aime Saint-Martin :

• Je refuse le fatalisme du récurrent “c’était mieux avant” ou du “il n’y a plus rien a faire”. Encore (relativement) jeune et (sans aucun doute) naïve mais aussi éclairée par un cursus professionnel au contact de ceux qui décident, j’aime à croire que MON île, NOTRE île, au-delà du fait de m’avoir vu naître, regorge d’autres richesses et est appelée à rayonner… encore.
• J’ai régulièrement envie de dire à ceux qui, pour des raisons souvent égoïstes, ne sont pas ou plus satisfaits de l’accueil qui leur est réservé (ou qui regrettent de ne pas retrouver les standards du territoire qu’ils ont quitté) qu’ils sont aussi libres de repartir. Dans le contexte actuel, Saint-Martin ne peut être un choix par défaut, la facilité n’est plus d’actualité même si le système social à la française peut encore laisser espérer quelque eldorado.
• J’ai aussi envie de dire aux saint-martinois que la nature a horreur du vide, et qu’à ce moment de notre histoire, être “from here” ne saurait suffire. Etre né saint-martinois n’est pas une compétence, c’est surtout la possibilité de déployer ses racines, encore faut-il accepter sur leurs bases d’élever tronc, branches et greffes… Prétendre à l’autonomie, à la maîtrise et à la prospérité passe nécessairement par une plus grande conscience et une plus forte implication.
• Je ne supporte plus les analyses tronquées, laxistes ou mono-chromatiques et qui ne prennent en considération ni l’histoire ni les réalités de cette île et de sa population. Je ne comprends pas plus le mutisme des saint-martinois dans ces colonnes locales, comme s’ils ne disposaient d’aucune qualité d’écriture et d’analyse de leur propre territoire. Ce paradoxe entraîne de fait une information parfois incomplète, entre ceux dont la prose est plus motivée par la vente d’espaces publicitaires que par l’Information, ceux qui aimeraient en dire plus mais ne le peuvent faute de légitimité, et d’autres qui le pourraient mais n’en voient pas l’utilité ou redoutent “de se mouiller” : à Saint-Martin plus qu’ailleurs, l’ouvrir, prendre position, cela s’assume… parfois longtemps.

Ces mots sont délicats à poser dans notre contexte de montée des communautarismes, véritable terreau de la radicalisation, où chacun semble enclin à brandir le spectre du racisme au moindre mot ou geste déplacé. Ils reflètent pourtant une réalité et ce qui motive, en partie, cette prise de position aujourd’hui. Je n’ai ni excuse, ni mérite à les dire… J’ai une qualité que je n’ai pas eu à acquérir : I am from here !

Engagez-vous qu’ils disaient !

Et c’est parce que cela doit aussi s’assumer que je fais le choix de désormais promener ma plume dans les colonnes largement ouvertes de Sxminfo : décloisonner l’information, multiplier les angles d’approche, oser certains sujets grâce entre autres au sésame de mes racines.

SXMinfo est aujourd’hui le seul média local à avoir fait un choix éditorial différent, à se décaler suffisamment pour tenter d’intégrer toutes les strates de notre société, à promouvoir et encourager l’expression de tous, à chercher à comprendre, à projeter et à documenter ses analyses, et à vouloir se mettre au service de l’évolution statutaire quel que soit son devenir.

C’est aussi le seul à avoir fait le choix du multilinguisme en cohérence avec notre diversité sociétale et dans le respect de la langue du contributeur. Or, même si bien que saint-martinoise, l’anglais n’est pas ma première langue, il est évidemment des messages ou des cibles qui se prêtent plus naturellement à l’anglais, n’en déplaise à certains …

Au nom de l’amour de Saint-Martin… mais pour une construction commune

Je suis consciente que faire le choix de cette expression publique me vaudra quelques inimitiés pour parler avec euphémisme, que ce virage ne gommera pas un certain étiquetage bien pratique pour certains mais qui sera assumé. Je ne doute pas que quelques portes se fermeront tandis que certaines fenêtres pourront s’entrouvrir.

Mais, si mes mots peuvent à leur niveau contribuer à nourrir le débat, si ma diversité peut influer sur quelques opinions, si ma participation à SXMinfo permet d’élargir le champ de la réflexion… alors, le média peut être une des clefs d’un mieux vivre et faire ensemble ; vous savez, cet urgent besoin d’adhésion générale à la cause commune dont tout le monde parle et dont Saint-Martin a besoin mais qui peine à émerger…