Environnement. Retour sur l’étang Guichard au travers du point de vue du propriétaire et du gestionnaire
Il y a quelques semaines, nous vous éclairions sur la pression que subit l’étang Guichard et qui met sa naturalité en difficulté voire en péril. Le sujet avait alors été traité sur l’axe du constat et du bon sens, celui qui dit que l’environnement de Saint-Martin est l’essence même de son identité et que la pression démographique exercée sur notre territoire impose une prise de conscience environnementale civique, rapide, profonde et durable. Nous avons depuis rencontré Nicolas Maslach, conservateur de la Réserve Naturelle de Saint-Martin gestionnaire de l’étang et Béatrice Galdi, chargée de mission du Conservatoire du Littoral, propriétaire de l’étang.
L’étang Guichard, un espace protégé !
En préambule il est intéressant de savoir que cet étang fait l’objet d’une protection traduite dans un Arrêté de Protection de Biotope et dont l’article 3 dit ceci :
”Sont interdites à l’intérieur des terrains listés dans l’article 1 du présent arrêté toutes les activités susceptibles d’altérer ou de dégrader les milieux naturels notamment :
• Les constructions et installations à l’exception des infrastructures légères mentionnées dans l’article 4
• Les dépôts de toute nature (remblais, déblais, terrassements, etc…) ainsi que les rejets liquides ou gazeux de toute sorte mis à part ceux traités selon les normes en vigueur et sous couvert d’études scientifiques,
• l ‘introduction d’espèces animales et végétales sauvages allochtones
• l’élevage, le pâturage et Ia divagation de tous animaux domestiques, les activités agricoles,
• Les coupes, les mutilations et les destructions de végétaux sauvages,
• l’extraction et le prélèvement de matériaux, le captage des eaux ainsi que tous les travaux pouvant créer un dysfonctionnement du système hydrologique,
• L’allumage de feux,
• Les activités bruyantes,
• toute forme de circulation en dehors des sentiers balisés et de la voierie publique sauf autorisation (préfectorale ou communale) à but scientifique ou pour des raisons de gestion environnementale.”
Une capacité d’action limitée du propriétaire et du gestionnaire
Si le Conservatoire est bien propriétaire de l’étang, cet espace n’est en fait constitué que par la surface en eau, les berges relevant selon les secteurs de propriétés privées ou encore du domaine de la Collectivité. En ce sens, les capacités d’action de la Réserve et du Conservatoire sont relativement limitées puisque circonscrites à cet espace.
Or bien des pollutions proviennent de sources extérieures au plan d’eau et sont dès lors difficilement constatables. Par exemple, si l’on sait pertinemment que l’étang Guichard sert de collecteur de toutes les eaux qui peuvent transiter dans la ravine de Morne Oreilly-Saint-Louis, il n’est pas du ressort de la Réserve Naturelle ou du Conservatoire d’intervenir en amont de l’étang lui-même.
Une pollution avérée et dont la source est identifiée
A cette heure, l’une des principales source de pollution constatée par la réserve et le conservatoire est celle de la station d’épuration privée de la résidence Palmeraie Baie qui collecte les eaux usées des nouveaux lotissements. Le Conseil de Quartier N°3 avait en 2013 tiré la sonnette d’alarme sur la situation de l’étang dont la naturalité semble aux yeux de non spécialistes être passablement mise à mal.
Le Conservatoire du littoral et la Réserve naturelle tiennent ainsi un historique 2013/2014 des pollutions constatées et des démarches engagées pour chacune d’entre elles. Ainsi, rien qu’en 2013, le Conservatoire et la Réserve ont constaté des débordements d’eaux usées dans l’étang en provenance de la station en mars, juin, juillet, novembre et décembre. Le dysfonctionnement le plus grave date de début décembre et se poursuit toujours à ce jour, malgré de nombreuses actions.
Des suites qui ne semblent pas trouver d’efficience
Autant dire que la liste des infractions et des actions menées par le Conservatoire et la Réserve ne sont pas une vue de l’esprit même si en terme d’impact et de résultats, les solutions ne semblent pas émerger pour le moment…
Notons qu’en la matière, la Police de l’Eau relevait il y a peu encore de la responsabilité de la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de Guadeloupe (DEAL) jusqu’à ce que cette compétence soit transférée à la Préfecture de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
Gageons que la position du Préfet Chopin, qui témoignait lors des vœux de la Réserve de l’importance et du rayonnement de cet outil dont les actions se font au bénéfice de l’environnement et de notre territoire, soit partagée par l’ensemble de ses services.
Remblais : une pratique bien réelle et qui ouvre la porte aux constructions illégales (illustrations photos et google earth)
Sur un autre plan, celui des remblais effectués sur l’étang lui-même et sur lesquels aujourd’hui des habitations ont eu tout le loisir d’émerger dans la plus stricte illégalité, le Conservateur de la Réserve nous assure que la voie de la contravention de grande voirie (procédure pour occupation illégale du domaine public) sera utilisée.
Si l’on se réfère à l’outil grand public qu’est google earth, on ne peut en effet que constater l’ampleur et la surface qu’occupent aujourd’hui ce remblais avec près de 3800m2 et plusieurs constructions.
Voilà le genre de pratiques qui ne témoigne pas du civisme saint-martinois et qui laisse trop à penser que tout est toujours possible aux yeux et à la barbe des autorités.
Un défaut de collecte des ordures ménagères et des citoyens qui confondent “encombrants” et déchets ménagers
Enfin, il est aussi acté par le Conservatoire comme par la Réserve que les abords de l’étang souffrent de dépôts divers directement liés au manque de civisme et au laxisme.
Notons que là encore le Conseil de Quartier N°3 a de longue date alerté les autorités compétentes sur le fait que cet espace nouvellement loti ne jouit pas du ramassage des ordures ménagères, que la plage de Friar’s Bay est particulièrement fréquentée et que deux établissements commerciaux exercent sur les lieux : autant de déchets qui faute de pouvoir être correctement collectés se retrouvent trop souvent aux abords de l’étang Guichard.
Il n’est qu’à observer les points de collecte officiels et les abords de l’étang pour se rendre compte de l’ampleur des dégâts.
Là encore, l’action du Conservatoire du littoral et de la Réserve se trouve limitée par le fait qu’ils protègent le plan d’eau, mais pas les berges, sur lesquelles sont déposés les déchets. Les services de la Collectivité, qui possède une partie des berges, ont été sollicités pour une collaboration en vue d’un nettoyage.
La Réserve Naturelle et le Conservatoire du Littoral proposent aux amoureux de la nature et aux riverains une journée bénévole et volontaire de collecte de des déchets et encombrants le vendredi 04 avril 2014.