Le 21 novembre 2013, René-Jean Duret, Conseiller territorial de la Majorité RRR et Président du groupe RRR au Conseil, franchissait l’enceinte du Tribunal Correctionnel de Basse-Terre en audience foraine à Saint-Martin en compagnie de Maître Jean-Yves Le Borgne pour faire face au Vice-Procureur Flavien Noailles dans une affaire assez délicate à juger.
Pourquoi délicate ? Simplement parce que l’article 483-12 du code pénal sur lequel s’appuie l’accusation sera, entre les mains de Maître Le Borgne, le meilleur argument de la défense en ce qu’il est assez flou (l’article) dans son contour. Ainsi, à sa lecture et pour railler un peu, René-Jean Duret pourrait être présumé innocent (jusqu’à un éventuelle condamnation) de s’être mis dans une situation où potentiellement il pourrait risquer d’être coupable.
Bref, en ayant fait la démonstration du flou artistique de cet article, qui d’ailleurs occupe une part des débats à l’assemblée nationale comme au sénat, Maître Le Borgne avait requis de la bienveillance du le président du tribunal, Gérard Egron-Reverseau, la possibilité d’introduire une Question Prioritaire de Constitutionnalité pour contraindre, en théorie, le Conseil Constitutionnel à clarifier via les deux assemblées cet article.
Dans sa grande clémence et avec la bénédiction même du Vice-Procureur visiblement convaincu par le prêche du brillant avocat, la QPC avait été octroyée à la défense, libre alors à la cour de cassation qui “filtre” ce genre de requête, de la laisser accéder au Conseil Constitutionnel ou pas.
Et bien la réponse de la cours de cassation est tombée le 19 mars dernier et cette QPC ne sera pas transmise au Conseil Constitutionnel. La motivation de ce rejet est somme toute forte étrange puisqu’elle s’appuie non pas sur l’article du code pénal en l’état mais sur une formulation très proche de celle actuellement proposée par l’Assemblée Nationale(1). Si la cour de cassation avait, en adoptant cette démarche, voulu quelque part appuyer un texte qui n’est pour le moment pas en vigueur ou si elle avait voulu ne pas engorger la cour constitutionnelle, elle n’aurait pas pu faire mieux. Ceci étant, vis à vis de la deuxième hypothèse, l’engorgement du Conseil Constitutionnel, on sait ici qu’un recours porté par la Collectivité de Saint-Martin cheminera dans les rouages du prestigieux organe pendant des années pendant qu’une position relative aux spectacles de Dieudonné ne prendra que quelques heures.
Au bilan, René-Jean Duret retrouvera le Tribunal Correctionnel de Basse-Terre en audience foraine à Saint-Martin en septembre pour que “l’affaire” soit à nouveau examinée avec les lumières de la décision de la cour de cassation. On voit mal comment le Président du Tribunal, qui avait à l’issue de la plaidoirie accepté “l’option” QPC, introduisant donc par là le doute quant à la capacité de juger en toute sérénité sur la base de l’article tel qu’écrit dans le code pénal, pourrait être rigide et sentencieux.
Si la référence de la cour de cassation est le texte amendé par l’Assemblée Nationale, il reste à savoir si le tribunal considèrera que cela constitue un cas de jurisprudence et s’il choisira lui aussi de le prendre en référence. Dans ce cas, et au regard de sa nouvelle formulation, il apparaît clairement plus favorable à notre élu local.
Mais les voies de la justice sont impénétrable et si le travail de l’état à l’échelle préfectoral et depuis l’ère “Simonet” est au “respect de la légalité”, on ne peut pas dire que la même veine soit prise à l’échelle des tribunaux qui dans bien des cas encore se trouvent forts embarrassés à examiner et se prononcer sur nos spécifiques cas… héritage de l’absentéisme de la France oblige.
(1). “Le législateur, en incriminant le fait, par une personne exerçant une fonction publique, de se placer dans une situation où son intérêt entre en conflit avec l’intérêt public dont elle a la charge, a entendu garantir, dans l’intérêt général, l’exercice indépendant, impartial et objectif des fonctions publiques”.