Saint-Martin. Que comprendre des mots de la Présidente autour de la fiscalité ? – Acte 1
Que voilà journalistiquement un beau sujet abordé par la présidente, étoffé qui plus est de belles données bien traitées et organisées par les services de la Collectivité, le tout rendu public ou plutôt au public par l’entremise du travail journalistique sollicité par Aline Hanson au travers de cette conférence de presse. Sur ce constat… ne boudons pas notre plaisir, puisqu’on nous le demande.
Nous vous proposons donc un petit triptyque autour de la fiscalité et de la Présidente dont le premier volet est dédié à un décryptage sans prétention de son intervention du 29 avril 2014 :
• Que lire potentiellement et de prime abord entre les lignes ?
• Fiscalité, quels sont les maux… y’a-t-il des remèdes ?
• La fiscalité, une arme politique ou politisée
Acte 1 – Que lire potentiellement et de prime abord entre les lignes ?
A l’instar de bien des sujets prioritaires vécus par toutes les présidences depuis juillet 2007, et il y en a eu plus que de raison, il apparaît à la lecture des mots de la Présidente un véritable déni de responsabilité de la gouvernance actuelle quant à la situation fiscale de la collectivité.
En effet, cette situation, nous la devrions aux gouvernances passées, à ceux qui n’ont pas su faire preuve de réalisme en se passant notamment d’une providentielle taxation sur le carburant industriel, à ceux qui n’ont pas su négocier les transferts de charges dus au titre des compétences nouvelles.
Nous la devrions aussi à l’état qui ne s’est jamais donné les moyens de faire respecter les contraintes fiscales pas plus du temps où il en exerçait la pleine compétence qu’aujourd’hui où il est notre “prestataire” en terme d’assiette et de recouvrement.
Une part des difficultés est aussi imputable à notre député et chef de file de l’opposition au Conseil Territorial dont les actions ne seraient pas constructives : entre missions parlementaires dont la Présidente n’a pas été informée et commissions ad hoc réclamées comme s’il s’agissait du Saint Graal.
Naturellement, et cela ne peut être reproché à la Collectivité, l’ensemble des élus et des services en charge de cette problématique fiscale depuis que la COM est COM se donne les moyens d’utiliser les maigres leviers dont ils disposent pour parvenir à voter un budget primitif dont “on” ne cessera de clamer la transparence et la sincérité à grand coup de ratios et de chiffres.
Notons d’ailleurs autour du budget que dans le discours écrit de la présidente, rien n’apparaît en terme d’investissement dédié à l’économie mais que fort heureusement, le prononcé nous éclairera sur les 4.2% dédiés à ce secteur. Le social et l’éducation absorbant eux une part non négligeable de la maigre assiette supposée à disposition pour l’année 2014.
La compétence fiscale est donc pleinement assumée selon la Présidente et à l’échelle de ce qu’elle est aujourd’hui et de ce que peut la Collectivité.
Pour autant, est-ce que l’on peut se satisfaire de ce que cette compétence intègre actuellement et surtout n’intègre pas ? Et doit-on se résigner aux limitantes endémiques qui font que le produit de cette fiscalité est sans doute ridiculement bas vis à vis du potentiel (quoique celui-ci ait une tendance sérieuse à réduire ses potentialités) ?
“Il est impératif que tout le potentiel de notre système fiscal soit enfin exploité…. ” : ce qui peut sembler relever de la lapalissade mais la Présidente a pleinement raison car si ce système ne se met pas rapidement à ronronner au bénéfice du territoire, de ses routes, de la propreté, de la qualité des réseaux, du désenclavement numérique etc… et bien ce système n’aura bientôt plus grand chose à exploiter.
Au delà des chiffres et graphiques sur lesquels nous reviendrons, la Présidente est surtout revenue sur cette taxe additionnelle de 100€ et qui est dévolue aux frais de recouvrement et d’assiette, taxe qui avait largement fait grincer des dents en 2012 lorsqu’elle avait été instaurée.
Une façon de dire au citoyen que dans la mesure où l’état ne fait pas correctement son travail en termes de recouvrement et d’assiette tout en facturant trop grassement sa prestation à la Collectivité, celle-ci est contrainte de faire peser l’inefficience sur les petits foyers fiscaux, ceux-là mêmes qui profitent donc le plus des avantages sociaux divers et variés : les 100€, c’est pour payer le boulot que l’état ne fait pas et ils sont récupérés sur ceux qui bénéficient d’un RSA que l’on ne peut plus assumer dans de telles proportions !
Au bilan, forte de 8 500 foyers fiscaux non-imposables sur 17 113, notre collectivité a donc pu compter sur 850 000€ (même pas un mois de RSA) grâce à cette nouvelle taxe et cela justifie donc pleinement que celle-ci soit reconduite en 2013 dans les même conditions.
Enfin, la Majorité n’a pas souhaité alourdir la charge fiscale pesant sur les foyers saint-martinois contrairement à la tendance nationale. En l’état, et selon la Présidente, la fiscalité saint-martinoise reste donc très attractive à l’échelle nationale avec un petit bémol d’ordre fonctionnel : la règle des 5 ans de résidence qui permet d’obtenir le sésame de la résidence fiscale (règle introduite pour se protéger d’un afflux trop massif de population attirée par l’évidence fiscale de la collectivité nouvelle) et même bordée par une convention évitant la double imposition, reste d’une lourdeur absolue et source de déclarations à l’emporte pièce. Voilà un point qui selon toute vraisemblance fait partie des pistes de travail de la commission ad hoc chargée d’exploiter les potentialités du toilettage de la Loi Organique souhaité par le Ministre Lurel, redevenu député depuis.
Cette évidence, cette attractivité fiscale sera couchée sur le papier au travers d’un document intitulé “Doing business in Saint-Martin” qui devrait voir le jour avant la fin du mois de juin.
Pour autant, et sans douter de la bonne foi ni des services de la collectivité, ni de ses élus ni de celle qui les mène : quels sont maux fiscaux profonds et existe-t-il des remèdes ?