La décapitation de l’otage français Hervé Gourdel a été opérée au moment où le président François Hollande appelait, de la tribune des Nations unies, le monde à combattre le terrorisme partout. Les ravisseurs avaient donné un ultimatum de 24 heures à la France pour qu’elle déclare son arrêt définitif de toute attaque aérienne contre les groupes djihadistes en Irak.
Ces preneurs d’otage, toujours recherchés par les forces de l’ANP dans les massifs montagneux de Kabylie, savaient qu’ils ne pouvaient pas obtenir ce qu’ils demandaient en un laps de temps très court. Autrement dit, sa décapitation semble avoir été programmée dès le moment où il a été kidnappé. La raison est que ces ravisseurs savaient qu’ils ne pouvaient pas négocier avec les autorités françaises la libération de cet otage en contrepartie d’un paiement de rançon. Car la prise d’otage n’a pas eu lieu au Mali, au Niger ou dans un autre pays du Sahel où la France a pris l’habitude de négocier librement la libération de ses ressortissants en versant des rançons aux terroristes. Les exemples de ces libérations par le biais de rançons sont nombreux.
Quatre journalistes français ont été libérés en avril dernier après près d’une année de captivité en Syrie. La France aurait payé une rançon de 18 millions de dollars pour leur libération. Aussi, quatre autres otages français détenus par Aqmi à Arlit, au Niger, ont été libérés de la même manière en octobre 2013, après trois ans de captivité. S’ils ont été maintenus en vie durant toute cette période, c’est parce que leurs ravisseurs savaient que la France est un «bon payeur». Selon une enquête publiée par le New York Times en juin dernier, la France est le principal payeur de rançons. Elle le fait directement ou par des intermédiaires comme Areva ou certains pays du Golfe.
Paris, est-il précisé, a versé 58,1 millions de dollars depuis 2008 pour libérer ses ressortissants retenus par Al Qaida au Maghreb islamique. Mais dans le cas d’Hervé Gourdel, payer une rançon est quasi impossible, car les autorités algériennes sont connues pour leur refus catégorique de négocier avec les terroristes et encore moins de verser une quelconque rançon. Les auteurs de ce rapt savaient également qu’en maintenant cet otage en vie, ils finiraient dans la tombe, comme les preneurs d’otages du site gazier de Tiguentourine, à In Amenas, en janvier 2013. Ces terroristes avaient donc décidé de faire un coup d’éclat en décapitant ce citoyen français. Une exécution qui a eu un large écho médiatique.
D’un autre côté, ce crime odieux et abject vient d’apporter du l’eau au moulin du président français François Hollande qui a justifié à l’ONU les raids aériens menés en Irak et en Syrie, sans mandat onusien. Il mettait en avant les capacités de cette nouvelle organisation terroriste internationale à mener des attentats partout dans le monde.
Autrement dit, la décapitation d’Hervé Gourdel tombait au bon moment pour justifier l’offensive de l’Occident contre ce «monstre» d’Etat Islamique, dirigé par Abou Bakr Al-Baghdadi, un ancien détenu de la CIA, relâché en 2009.
S. Baker