Lettre ouverte à propos du conflit du CHU et concernant l’avenir de la santé
1.- Une construction hospitalière qui a mobilisé de nombreux professionnels guadeloupéens qui doivent être reconnus.
Le centre hospitalier de Pointe à Pitre est construit sur ce site depuis 1976 et est devenu universitaire au début des années 1980. On est ainsi passé en moins d’une génération de l’hospice Saint Jules au CHU actuel en passant par l’étape de l’hôpital Ricou.
La communauté hospitalière s’est mobilisée pour obtenir au fil des années le développement de nombreuses activités spécialisées (Grands brulés, Urologie, Caisson hyper barre, robot chirurgical, neurochirurgie, génétique, médecine nucléaire, radiothérapie, chimiothérapie, greffe rénale, recherches, etc.) indispensables à la prise en charge locale de la population et à la formation des étudiants.
Des personnels en nombre ont été nécessaires pour faire face à la montée en charge rapide des services hospitaliers. Ils ont su, pour la plupart, acquérir les compétences nécessaires au bon fonctionnement des établissements et notamment du CHU tout au long de son évolution. Si les évolutions des organisations et la richesse du statut de la fonction publique hospitalière ont permis de prendre en compte dans la mesure des possibilités ces expériences et compétences acquises, une partie de ces personnels voit approcher l’âge de la retraite sans avoir vu prendre en considération leurs acquis et le service rendu en son temps à la communauté hospitalière. Des évolutions de carrière sont donc réclamées. Elles doivent cependant se faire dans le respect de la réglementation d’une part et surtout en fonction des nécessités organisationnelles des services. L’enjeu est donc aujourd’hui de proposer des parcours professionnels reconnaissant la valeur et une juste reconnaissance du travail effectué d’une part tout en projetant de nouvelles organisations de travail dans les années à venir plus économes en postes de travail afin de redéployer l’emploi sur de nouveaux métiers autour du patient.
2.- Dans le même temps aujourd’hui le CHU doit faire face à des enjeux majeurs liés à l’évolution du système de santé au bénéfice du patient dans un contexte financier contraint.
2.1.- Une évolution de contexte : les patients veulent être soignés au plus près de leur lieu de vie et recourir à des établissements de santé modernes, accueillants, efficaces.
Nous connaissons en Guadeloupe un grand nombre de malades chroniques qui doivent avant tout rester à leur domicile et bénéficier des soins adéquats et d’éducation thérapeutique pour gérer efficacement leur maladie. Le médecin traitant et le patient sont au cœur du système de santé aujourd’hui et encore davantage demain.
Des structures hospitalières sont cependant nécessaires autour afin que le parcours de santé des patients ne connaisse pas de ruptures. Les établissements de santé doivent donc offrir des consultations de spécialistes avancées et en dernier recours une offre d’hospitalisation.
2.2.- Dans l’offre hospitalière, le CHU a un rôle majeur à jouer.
L’hôpital est un recours pour des soins aigus ; son plateau technique sera demain plus concentré ; ses équipes davantage spécialisées ; sa gestion optimisée.
En Guadeloupe, outre cette perspective, le CHU nécessite d’être reconstruit aussi pour faire face au risque de séismes, le récent tremblement de terre de décembre 2014 nous a rappelé cette urgence. En dépit des efforts de maintenance et de modernisation, ses bâtiments sont aujourd’hui inadaptés aux normes actuelles tant hôtelières que de soins des patients. Le CHU abrite aujourd’hui trois fois plus de services et deux fois plus de personnels que ce pour quoi il a été construit en 1976. Le caractère indispensable de sa reconstruction explique l’octroi d’un financement intégral par les pouvoirs publics à hauteur de 590M€ ce qui en fait le second dossier national majeur d’investissement hospitalier.
2.3.- cependant, compte tenu des objectifs de la France en matière de gestion des comptes publics, l’offre doit s’améliorer tout en optimisant les couts.
Le Parlement a voté une loi fixant l’évolution des crédits d’assurance maladie. Il est donc nécessaire d’optimiser les organisations et de rechercher des gains (exemple : mutualiser les achats entre établissements de santé) pour assurer un équilibre financier, tout particulièrement pour le CHU qui connait un déficit structurel de 50 millions d’euros.
Avoir un établissement en équilibre, c’est retrouver la confiance avec les fournisseurs, c’est offrir aux professionnels de l’établissement des fournitures et des équipements médicaux en temps et en heure, faire disparaitre le rationnement, pouvoir recruter, pouvoir investir, et donc mieux prendre en charge les patients.
3- Dans ce contexte, tout conflit social qui ne se résoud pas rapidement accroit les tensions dans les prises en charge et détourne l’énergie de la communauté hospitalière du véritable objectif commun que doit être l’amélioration du service rendu qui vous est rendu. Ne pas sortir rapidement de cette impasse c’est également prendre le risque de compromettre durablement la reconstruction hospitalière réclamée par tous.
Alors quelles conditions pour une reprise du dialogue social ?
Plus de 40 jours de conflit au pole Logistique du CHU, pôle qui assure l’approvisionnement de l’ensemble de l’établissement en repas, linge, fournitures diverses, dispositifs médicaux, petits matériels et la réalisation de l’ensemble des commandes du CHU, c’est trop !
Nous le disons encore, nous comprenons le motif des discussions : reconnaitre pour certains des parcours professionnels notamment par l’accès au grade supérieur planifiés dans le temps.
Nous disons aussi, aujourd’hui le CHU est en danger, les prises en charge se dégradent et le dossier de reconstruction qui sera soumis au COPERMO de Mars prochain pourrait être remis en cause.
Aussi, nous appelons la direction du CHU et le syndicat à la reprise urgente du dialogue.
Pour que ce dialogue reprenne dans des conditions normales, nous demandons qu’il s’effectue en un lieu neutre fixé par l’ARS, accepté par les 2 parties ; nous demandons que les délégations soient composées d’un nombre limité à 10 représentants maximum pour chaque partie; Nous proposons par ailleurs qu’une médiation soit assurée dans des conditions qui seront proposées aux deux parties. L’objectif est de parvenir à une sortie de conflit d’ici la fin de la semaine prochaine.
Il en va de l’avenir du CHU, de la santé publique hospitalière en Guadeloupe et de la santé de tous les Guadeloupéens
Communiqué du Directeur Général de l’ARS de Guadeloupe, du Président du Conseil de Surveillance du CHU et du Président de la Fédération hospitalière de Guadeloupe