Au cours d’une réunion lundi à Bruxelles, les ambassadeurs d’une majorité des 28 pays membres ont souhaité que l’alliance relaie au plus tôt la coalition qui a lancé les premiers raids depuis samedi.
Paris, assez isolé, renâcle, arguant que si l’Otan dirige l’intervention, les pays arabes ne voudront pas s’y rallier et finiront même par la dénoncer.
Les discussions à l’Otan , qualifiées de “très difficiles” par un diplomate allié, étaient suspendues une fois de plus lundi soir.
Actuellement, les opérations de la coalition emmenées par les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, sont nationales et coordonnées par les QG américains de Ramstein (ouest de l’Allemagne) et Naples (sud de l’Italie).
Quel rôle pour l’Otan ?
Le président américain Barack Obama a assuré que “l’Otan jouera un rôle” dans un délai “de jours, non de semaines”. “L’Otan sera impliquée dans une fonction de coordination en raison de l’extraordinaire capacité de cette alliance”, a précisé le président américain depuis le Chili où il est en visite.
Le Premier ministre britannique, David Cameron, s’est prononcé lundi devant le Parlement pour que l’Otan prenne “au bout d’un moment” les commandes, tout en évoquant la possibilité qu’un officier britannique, américain ou français soit nommé à la tête de l’opération.
Mais le chef de la diplomatie luxembourgeoise Jean Asselborn, a résumé le sentiment général: “mon pays comme beaucoup d’autres, n’a qu’un seul moyen de s’engager, c’est dans le cadre de l’Otan “.
Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a demandé lui aussi lundi soir que l’Otan prenne en main les commandes. “Nous souhaitons que le commandement des opérations passe à l’Otan et qu’il y ait une coordination différente de celle qui existe actuellement”, a-t-il déclaré.
Son ministre des Affaires étrangères, Franco Frattini, a lâché que si la question n’était pas réglée, son pays reprendrait le contrôle des bases qu’elle a mises à la disposition de la coalition.
Témoignant de la tension grandissante, la Norvège a annoncé qu’elle “suspendait” la participation aux opérations de ses avions F-16 arrivés en Italie puis repartis en Crète, “à une clarification du commandement”.
La position de Paris Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, à l’issue de la réunion de l’UE, a observé que “l’Otan était disposé à venir en soutien de la coalition dans quelques jours”, semblant réserver un rôle complémentaire et non central à l’alliance. La position française est ainsi décryptée par un responsable militaire: “Il faut trouver une formule permettant de recourir aux moyens de l’Otan sans que son drapeau n’apparaisse”. |
Berlin et Ankara opposés à des bombardements
Autre point de dissension, l’Allemagne et surtout la Turquie, ne veulent pas que l’Otan, si elle devait finalement intervenir, bombarde à son tour comme la coalition l’a fait depuis 48 heures. Des objections qui ne portent pas sur le commandement, mais sur la nature de l’intervention de l’Otan.
Au terme d’une semaine de débats intensifs, les plans opérationnels pour deux des trois missions qui pourraient incomber à l’Otan -sécurisation d’une opération humanitaire, respect de l’embargo sur les armes- ont été validés.
Dimanche soir, cependant, l’ambassadeur turc a demandé à l’Otan de revoir sa copie en ce qui concerne la troisième mission, -une zone d’interdiction aérienne-, voulant apparemment des garanties sur les règles d’engagement afin que les civils libyens ne soient pas mis en danger.
Une opération sans pilote
Paris, Londres et Washington n’avaient toujours pas désigné lundi de commandement unifié pour leurs opérations, une situation inédite dans les annales militaires récentes.
Actuellement, les opérations de la coalition emmenées par les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, sont nationales et coordonnées par les QG américains de Ramstein (ouest de l’Allemagne) et Naples (sud de l’Italie).
De facto toutefois, l’état-major américain, immédiatement opérationnel, assume le leadership de cette coordination.
Il s’agit d’une “opération coordonnée par les Etats-Unis, en étroite collaboration avec les autorités françaises et britanniques et qui pourrait être soutenue par l’Otan”, a confirmé lundi le ministère français de la Défense.
Jusqu’ici, du Kosovo à l’Irak et à l’Afghanistan, toutes les opérations multinationales, qui plus est sanctifiées par une résolution de l’Onu,ont été conduites ces dernières années sous pavillon unique, des Nations unies elles-mêmes, de l’Otan, des Etats-Unis ou encore de l’Union européenne.
L’opération franco-américano-britannique en Libye reste donc jusqu’à présent l’exception à la règle.
“Il n’y a pas d’état-major centralisé et à ce stade, chacun utilise ses états-majors propres de façon coordonnée”, a expliqué le porte-parole du ministère français de la Défense, Laurent Teisseire.
Symbole de cette situation, les opérations en Libye ont été baptisées “Harmattan” par les Français, “Ellamy” par les Britanniques et “Aube d’une odyssée” par les Américains.
Source AFP / France2