DU « SPONSOR » AU « COMMANDITAIRE » : FENÊTRE OUVERTE SUR LA TRADUCTOLOGIE CRÉOLE
Robert Berrouët-Oriol
Linguiste-terminologue
Montréal, le 7 février 2013
Des internautes, qui ont lu mon récent article «TOUR OPÉRATEUR» OU «VOYAGISTE» : LEQUEL DES DEUX CONDUIRA LES TOURISTES SUR LES PLAGES D’HAÏTI?», sur les sites l’Atelier des média1 (Radio France internationale), Potomitan2, Montray kréyol3 et CanalPlus4, etc., me demandent de commenter l’emploi des termes «sponsor» et «sponsorisé» dans les médias haïtiens.
Je souscris volontiers à cet échange en établissant au préalable une utile distinction entre la langue usuelle et la langue de spécialités. De manière générale, dans une communauté de sujets parlants, la langue usuelle s’entend au sens de discours familier, des expressions familières, du langage populaire, de la langue courante, de la langue de la conversation, de la langue parlée: c’est la langue de tous les jours. Elle peut fréquenter, selon le contexte énonciatif, les registres formels ou soutenus et, au besoin, faire appel à des termes spécialisés. Par exemple, dans la langue de tous les jours mais sur un registre soutenu, le présentateur des nouvelles de la chaîne cablée Télé Macaya dira: «Inquiétude au Tribunal pénal international: l’actuel Exécutif haïtien garantit l’impunité au dictateur Jean-Claude Duvalier pour tous ses crimes, vols, viols, disparitions et détournement de fonds publics». Dans les sciences du langage, la langue de spécialité s’entend au sens d’un «Sous-système linguistique qui comprend l’ensemble des moyens linguistiques propres à un champ d’expérience particulier (discipline, science, technique, profession, etc.) La langue de spécialité est donc une «Expression générique pour désigner les langues utilisées dans des situations de communication (orales ou écrites) qui impliquent la transmission d’une information relevant d’un champ d’expérience particulier.» (Grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française) Par comparaison, on peut poser que le vocabulaire de la langue usuelle est consigné dans les dictionnaires généralistes (Le Robert, Le Petit Larousse, etc.), tandis que le vocabulaire des langues de spécialités, lui, couvre des domaines techniques et scientifiques. Ces domaines sont étudiés par des Commissions de terminologie et leur vocabulaire figure dans des monographies, des dictionnaires sectoriels ou thématiques, des glossaires, des banques de données terminologiques disponibles en ligne5.
Dans une communauté de sujets parlants et selon les contextes et la nature de la communication mise en œuvre –orale ou écrite, grand public ou spécialisée–, la langue générale peut faire appel aux langues de spécialités. Ainsi, dans les médias, un éditorialiste parlera d’épidémie de «jaunisse» à Fond-des-Nègres, tandis qu’un rédacteur de la revue professionnelle l’Actualité médicale précisera qu’il s’agit d’un «ictère»: l’«Ictère est synonyme de jaunisse. Il correspond à une coloration jaune de la peau et des muqueuses due à l’accumulation dans les tissus de bilirubine. La première manifestation visible d’un ictère apparaît au niveau des conjonctives oculaires. La bilirubine est un pigment jaune ocre excrété dans la bile.» (Doctissimo.fr – Dictionnaire médical).
Le «sponsor» dans le rétroviseur de la terminologie
Depuis un certain nombre d’années, et en lien direct avec l’expansion NTIC (nouvelles technologies de l’information et des communications), un grand nombre de termes scientifiques et techniques ont migré des langues de spécialités vers les dictionnaires généralistes qui, désormais, consignent une vaste palette de termes spécialisés provenant des domaines scientifiques et techniques. Les langues naturelles, étant souventes fois des langues voyageuses, des langues en contact, on assiste à un incessant croisement entre la langue générale et les langues de spécialités, notamment au moyen des emprunts. Ainsi en est-il des termes «sponsor» et «sponsorisé», bien installés dans plusieurs médias haïtiens, aussi bien en créole qu’en français, tant à l’oral qu’à l’écrit.
En ce qui a trait au traitement de l’écrit, la presse publiée en Haïti est une extraordinaire et très fertile mine d’or pour le champ de la recherche terminologique. Ainsi, une requête dans les pages archivées du Nouvelliste de Port-au-Prince, à l’aide du mot-clé «sponsor», indique 835 occurrences du terme, ce qui signifie qu’il a été utilisé 835 fois dans des textes divers.
Exemple 1: «Une telle incertitude empêche aux (sic) orchestres de chercher des sponsors, d’investir dans un vidéoclip, de se préparer pour le plus grand show de l’année qui est la participation au carnaval.» (La liste des groupes du défilé carnavalesque, un enjeu politique, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 30 janvier 2013)
Exemple 2: «Patrick Cauvin avoue que tout ceci n’aurait pu se réaliser sans l’aide et la générosité des amis, des sponsors et du gouvernement. Et je tiens à remercier tous ceux-là qui ont contribué à la réussite de cet atelier.» (Patrick Cauvin remercie ses sponsors et les représentants des média, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 5 décembre 2012)
Une recherche analogue, dans les pages archivées du Nouvelliste de Port-au-Prince, à l’aide du mot-clé «sponsorisé», indique 150 occurrences du terme, ce qui signifie qu’il a été utilisé 150 fois dans des textes divers.
Exemple 3: «Les jeunes qui fréquentent l’UNDH grâce à ce partenariat sont, pour certains, des anciens enfants sponsorisés, mais ils viennent tous d’un réseau de plus de cinquante clubs d’enfants et de jeunes défenseurs de leurs droits dans le Sud-Est que l’ONG internationale de protection de l’enfant encadre depuis plusieurs années.» (Plan Haïti renforce la salle informatique de l’Université Notre-Dame d’Haïti, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 9 décembre 2011)
Exemple 4: «Le Reham Al-Farra Journalists’ Fellowship Programme, créé en 1980 et sponsorisé par le Département Communication et Information de l’ONU, se déroule pendant les mois de septembre et d’octobre de chaque année au siège de l’organisation à New York (Manhattan). Ledit programme a pour objectif de permettre aux participants, essentiellement des journalistes venant des pays en développement, de se familiariser avec le travail de l’ONU.» (À la découverte de l’ONU, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 6 décembre 2010)
Les termes «sponsor» et «sponsorisé» ont été étudiés par les Commissions de terminologie du Québec et de la France. Dans les domaines génériques de la publicité et de l’appellation de personnes, le terme anglais «sponsor» a pour équivalent français «commanditaire». Le «commanditaire» (n. m. ou f.) –terme normalisé par la Commission de terminologie de l’Office québécois de la langue française en février 1991–, désigne une «Personne physique ou morale qui apporte un soutien matériel à une manifestation, à une personne, à un produit ou à une organisation en vue d’en retirer des avantages publicitaires directs.» (Grand dictionnaire terminologique) Le terme «commanditaire» a pour synonymes «parraineuse» (n. f.) et «parraineur» (n. m.), et celui-ci, qui a fait l’objet d’une recommandation officielle en France, est surtout employé en Europe.
De surcroît, dans le dossier terminologique portant sur ces notions, le Grand dictionnaire terminologique précise que «Le nom commanditaire est masculin lorsqu’il désigne une personne morale (il en est de même pour parraineur). Par exemple, on dira La société Plurimage, fier commanditaire de la Semaine québécoise des arts visuels ou encore La société Plurimage est le principal commanditaire de la Semaine québécoise des arts visuels.» Enfin le dossier terminologique portant sur ces notions signale, au champ «note», qu’«On trouve aussi parrain, qui n’est toutefois pas recommandé dans ce sens, en raison des connotations péjoratives qui peuvent lui être associées. La conclusion du dossier figurant dans le Grand dictionnaire terminologique est particulièrement éclairante, et je crois utile de la retranscrire en petites capitales : « LE TERME « SPONSOR » EST UN EMPRUNT INTÉGRAL À L’ANGLAIS QUI FAIT INUTILEMENT CONCURRENCE À « COMMANDITAIRE ». POUR CETTE RAISON, ON ÉVITERA DE L’EMPLOYER.»
Pour sa part, la banque de données terminologiques et linguistiques du gouvernement fédéral canadien, Termium Plus, consigne sur l’une de ses fiches des données concordantes pour le terme «sponsor» dont l’équivalent recommandé est «commanditaire». Dans Termium Plus, ces termes sont indexés dans les domaines «Agences et services de publicité» et «Gestion des communications et de l’information».
La base de données au service de l’Union européenne, la IATE (Inter Active Terminology for Europe), propose un dossier terminologique fort pertinent quant à l’emploi de «sponsor». Tout en renvoyant au terme «parrainage», ce dossier introduit un indice d’emploi, l’«usage régional», et précise que le «terme anglais «sponsor» remplacé (est) à proscrire» en français. Dans cette base de données le terme «sponsor» a pour équivalents «parraineur» et «parrain» et, conformément à l’arrêté du 6 janvier 1989 relatif à la terminologie économique et financière paru au Journal officiel de la République française, ces termes sont d’un usage obligatoire dans l’Administration publique et dans les transactions langagières avec elle. Enfin, les deux termes «sponsor» et «sponsorisé», sont attestés dans la base de données du Centre national des ressources textuelles et lexicales du CNRS (France) mais avec une note conclusive de première importance. En voici un extrait:
‘‘Prononc.: [spɔ ̃sɔ:ʀ]. Étymol. et Hist. 1954 aux États-Unis (R. Cartier, Les Quarante-huit Amériques, 39 ds Höfler Anglic.); 1971 (Champion, 15 juill.-15 août, 92b, ibid.). Empr. à l’angl.sponsor att. dep. le xviies. aux sens de «parrain, marraine (de baptême)» et, comme terme jur., de «garant, caution, répondant» d’où son empl. pour désigner celui qui finance une émission ou un spectacle, gén. en bénéficiant d’annonces publicitaires, att. dep. 1931 aux États-Unis (NED Suppl.2). L’angl. est empr. au lat. sponsor «garant, répondant de quelqu’un» et, en lat. chrét. «parrain, marraine». Les arrêtés du 17 mars 1982 et du 24 janv. 1983 recommandent l’usage de COMMANDITAIRE pour éviter cet anglicisme /sponsor/ (Néol. off. 1988, nos2093 et 409).»
Depuis plusieurs années, l’Ordre des comptables agréés du Québec publie une revue réputée pour sa rigueur scientifique et qui est disponible en ligne, la «Terminologie comptable». En septembre 1989, il a fait paraître «Le dossier «sponsor» dont voici les conclusions. Compte-tenu de sa pertinence, j’en livre ici un long extrait.
« Dans les dictionnaires généraux, [pour le terme sponsor] on trouve de plus le sens suivant: «a person or an organization that pays for or plans and carries out a project or activity». En réalité, le fait pour une entreprise de subventionner une initiative culturelle ou sportive, même si cette contribution permet une certaine publicité, est plutôt tenu pour une forme de corporate patronage, c’est-à-dire une forme de philanthropie ou de mécénat.
En Europe, à l’heure actuelle, le mot «sponsor» désigne d’abord l’entreprise qui finance en tout ou en partie une manifestation jugée d’intérêt public en retour du droit d’y associer son nom. Il s’agit proprement, pour elle, d’une forme de publicité. Par extension, l’entreprise qui associe son nom à une émission de télévision ou de radio s’appelle également «sponsor».
Le mot a aussi provigné: on parle de «sponsoring» (action de celui qui se fait «sponsor») et de «sponsoriser» (se porter «sponsor»).
Comme il se produit souvent dans les cas d’emprunt, le mot emprunté ne conserve pas toujours très exactement les sens qu’il a dans la langue d’origine.
Au Canada, le sens publicitaire du mot sponsor a toujours été rendu par commanditaire, le verbe to sponsor par commanditer et le substantif sponsorship par commandite. L’usage juridique du mot commandite en France rend difficile sa substitution à «sponsor». Il est évident que le rejet de l’usage canadien par les Européens francophones tient à l’écart de sens qui sépare les notions en présence.
Un arrêté récent de la Commission de terminologie du ministère de l’Économie, des finances et du budget (France) s’attaque à l’usage de «sponsor» et de ses dérivés en français. L’arrêté établit d’abord la distinction entre le parrainage et le mécénat.
Dans les deux cas, il s’agit d’un soutien matériel apporté à une manifestation ou à une organisation mais, dans le parrainage, il y a volonté de tirer un bénéfice direct de ce soutien tandis que, dans le mécénat, les intentions sont moins mercantiles. On cherche alors surtout à valoriser son image. »
Synthèse
Retour sur l’intrus «sponsorisé»
Quant à lui, le terme «sponsorisé» a été étudié selon la même logique et dans une aire sémantique similaire. Le dossier du Grand dictionnaire terminologique consigne les termes «sponsored by» dont l’équivalent français est «commandité par» (loc. = locution), et qui, dans les domaines génériques de la publicité et du commerce, se définit comme suit: «Se dit d’une personne ou d’un organisme qui est financé à des fins publicitaires.» Le terme «commandité par» est lié à plusieurs quasi-synonymes: «parrainé par» (loc. = locution), «financé par» (loc.), «organisé par« (loc.), «avec le concours de» (loc.), «avec la participation de» (loc.), «à l’initiative de» (loc.), «sous les auspices de» (loc.), «sous l’égide de» (loc.). Dans le dossier étudié et dont les données remontent à 1989, le Grand dictionnaire terminologique précise que l’expression «sponsorisé par» est un anglicisme et que son emploi est déconseillé. Il est intéressant de souligner qu’il y a concordance relative entre le Grand dictionnaire terminologique et Termium Plus, qui donne accès, pour «sponsored by», à l’équivalent français «sous l’égide de», tout en précisant que la forme verbale calquée «sponsoriser» (sponsorisé) est un anglicisme en France et en Belgique –comme, du reste, au Canada. La base de données au service de l’Union européenne, la IATE, la base terminologique du CILF (Conseil international de la langue française), ainsi que FRANCETERME –répertoire de tous les termes publiés au Journal officiel de la France par la Commission générale de terminologie et de néologie de l’Hexagone–, ne consignent aucune donnée spécifique sur le calque dérivé «sponsorisé». C’est sans doute un indicateur par défaut, mais il aurait mieux valu inscrire le terme «sponsorisé» au champ d’une «forme fautive» ou d’un «terme déconseillé», avec un renvoi au terme recommandé «commandité par», puisque la IATE et FRANCETERME comprennent des dossiers relatifs au terme «sponsor» dans des domaines tels que «l’économie et la gestion d’entreprises». Par ailleurs, la Banque de données terminologique du Ministère de la Communauté française de Belgique étant en maintenance, je n’ai pu l’interroger en ligne. Il en est de même pour la BDLP·Antilles (la Base de données lexicographiques des Antilles): dans sa phase initiale, elle n’est pas encore interrogeable.
Dans un souci d’efficacité maximale de la communication et dans le contexte haïtien, on posera donc, à partir des données terminologiques et lexicographiques disponibles, que LE TERME « SPONSORISÉ » EST UN EMPRUNT INTÉGRAL À L’ANGLAIS QUI FAIT INUTILEMENT CONCURRENCE À « COMMANDITÉ PAR » COMME À « PARRAINÉ PAR ». Il y a donc lieu, et en conformité avec les travaux des Commissions de terminologie cités dans cette étude, de proposer de ne pas employer dans les médias haïtiens les termes «sponsor» et «sponsorisé», aussi bien en créole qu’en français. Les termes corrects recommandés sont: «commanditaire» (n. m. ou f.) pour «sponsor»; également «commandité par», «parrainé par», «financé par» pour «sponsorisé», termes que tout journaliste peut librement choisir d’utiliser dans le cours habituel de son travail.
Pour conclure, bien provisoirement peu s’en faut : quel est l’intérêt essentiel de ce type de recherche terminologique pour les médias haïtiens? Je l’ai à dessein titrée, mais en première mouture, « L’EXÉCUTIF HAïTIEN, POUVOIR OUVERTEMENT NÉO-DUVALIÉRISTE, EST-IL UN SPONSOR OU UN COMMANDITAIRE ? » Par ce premier titre, qui exprime une donnée vérifiable (la nature néo-duvaliériste de l’actuel Exécutif haïtien), j’entendais interpeller fortement médias et lecteurs et les introduire à la problématique des emprunts, des néologismes et des calques. Je voulais également attirer leur attention sur la nécessité d’une politique de l’emprunt linguistique en français comme en créole haïtien dans le cadre, certes plus large, d’une future loi portant spécifiquement sur l’aménagement de la langue parlée par tous les Haïtiens nés et élevés en Haïti, le créole –aménagement qui devra en toute rigueur, et selon ma vision de linguiste, viser la parité statutaire du créole avec le français. Cette perspective relève aussi d’une nécessaire «traductologie6 créole» dont il faut déjà entrevoir les bases théoriques et les contours d’une spécialisation dont le pays a un urgent besoin, la traduction professionnelle vers le créole. Ce vaste champ d’intervention, couplé à la rédaction administrative en créole, pourrait donner du travail à des milliers de jeunes universitaires du pays. La traductologie, discipline régionale de la linguistique, désigne l’étude théorique de la traduction; elle s’entend également au sens de science qui étudie le processus et les règles de la traduction (Grand dictionnaire terminologique). Il ne s’agit donc pas de récuser les emprunts au motif d’un purisme passéiste, idéologique et improductif, mais de bien s’inspirer des acquis méthodologiques de la terminologie et de la traductologie en langue française afin d’ouvrir d’utiles chantiers terminologiques et traductologiques pour la langue créole et en créole. Car cette langue, à l’instar de toute autre langue naturelle –quant à sa grammaire, sa richesse lexicale, sa morphologie, ses stratégies d’innovation en matière de transferts linguistiques–, dispose des instruments de base qui lui permettront d’élaborer le matériel didactique ainsi que tous les vocabulaires scientifiques et techniques de la modernité et de nommer cette modernité dans la vie de tous les jours. Il s’agit donc d’en tracer les voies durables au creux des sciences du langage.
Encore faut-il vouloir en prendre la juste mesure: toute la problématique linguistique haïtienne est traversée par LE politique. En clair, LE linguistique a partie liée avec LEpolitique car il appartient à l’État de légiférer en matière d’aménagement du créole et du français en Haïti. Du référendum constitutionnel de 1987 à l’An-abyme 2013, le créole n’a pas bénéficié, dans le corps social haïtien comme d’ailleurs dans la totalité du système éducatif national, de la parité statutaire avec le français en dépit de toutes les avancées connues, notamment dans les médias. Depuis la Réforme Bernard de 1979 –l’une des rares interventions d’envergure nationale de l’État haïtien dans les champs linguistique et didactique–, les principales conquêtes du créole sont le fait de la société civile, notamment des luttes démocratiques anti-duvaliéristes. Et voici que le créole, un champ majeur de la reconstruction du pays suite au séisme de 2010, n’est pas perçu comme tel, au titre d’une priorité de modernisation du pays haïtien et qu’il est relégué en exil programmatique des interventions de l’État et de nombre de «projets» de reconstruction du système éducatif national commandités, hélas, tant par l’international que par ses antennes locales et diasporiques…
Nous voici au cœur d’une aporie kafkaïenne: interpeller l’État pour qu’il légifère en matière d’aménagement linguistique, et du coup situer un enjeu de taille, à savoir que la société civile ainsi que le pouvoir législatif auront sans doute à négocier cet aménagement avec un Exécutif néo-duvaliériste bouffon, démagogue et affairiste, et dont on mesure déjà combien il s’avère indocte quant au rôle du créole dans la reconstruction du pays. J’y reviendrai, certainement.
Notes
1. L’ATELIER DES MÉDIAS (Radio France internationale):
2. POTOMITAN:
http://www.potomitan.info/ayiti/berrouet-oriol/tour-operator.php
3. CANALPLUS HAITI:
http://www.canalplushaiti.net/?p=6267
4. MONTRAY KRÉYOL
http://www.montraykreyol.org/ecrire/?exec=articles&id_article=6116
5. Le site de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France fournit un catalogue, non exhaustif, des principales bases de données. Les voici:
FRANCETERME, base de données terminologique de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France.
NOSLANGUES.GC.CA, le portail linguistique du Canada.
GRAND DICTIONNAIRE TERMINOLOGIQUE: 3 millions de termes français et anglais du vocabulaire industriel, scientifique et commercial, dans près de 2000 domaines spécialisés. Des définitions, des synonymes et des notes explicatives. Réalisé par l’Office de la langue française du Québec et mis à disposition gratuitement grâce au partenariat avec Semantix.
BANQUE DE DONNÉES TERMINOLOGIQUES du Ministère de la Communauté française de Belgique.
IATE, base de données de la commission européenne.
LOGOS: base de données, mise à jour et corrigée en ligne par un réseau de traducteurs professionnels, contenant plus d’un million d’entrées en 31 langues.
BASE TERMINOLOGIQUE DU CILF (Conseil international de la langue française).
BISTRO: banque de terminologie juridique de l’Accademia europea à Bolzano.
ILOTERM: la banque de données terminologiques du Bureau international du Travail (BIT) en quatre langues (allemand, anglais, espagnol et français) Attention ne marche qu’avec internet explorer.
TERMPOST: la banque de données terminologiques de l’Union postale universelle (UPU) en cinq langues (allemand, anglais, espagnol, français, et portugais) ADAPTER L’ADRESSE.
TERMITE: base de données consacrée essentiellement à la terminologie des télécommunications issue des normes techniques.
6. Sur le champ neuf de la «traductologie créole», voir entre autres la réflexion de la linguiste Marie-Christine Hazaël-Massieux: «La traduction de la bible en créole haïtien» dans «Présences haïtiennes» (Université de Cergy-Pontoise – Centre de recherches textes et francophonie), 2006. Abordant «La traduction de quelques termes ou expressions spécifiques», elle prend en compte les procédés suivants: (a) «la créolisation du terme français»; (b) «les calques»; (c) les «périphrases explicatives» et (d) les «adaptations aux nouveaux contextes». Voir aussi l’étude de Ronald Charles, «Préjugés linguistiques dans différentes traductions bibliques en créole haïtien» sur le site Créolica: http://creolica.net/Prejuges-linguistiques-dans.
[L’AUTEUR : Robert Berrouët Oriol, linguiste-terminologue, poète et critique littéraire, est l’auteur de la première étude théorique portant sur « Les écritures migrantes et métisses au Québec » (Quebec Studies, Ohio, 1992). Son avant-dernière oeuvre littéraire, « Poème du décours » (Éditions Triptyque, Montréal 2010), a obtenu en France le Prix de poésie du Livre insulaire Ouessant 2010. Ancien enseignant à la Faculté de linguistique d’Haïti, il est également coordonnateur et coauteur du livre de référence « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » — Éditions du Cidihca, Montréal, et Éditions de l’Université d’État d’Haïti, 2011. Nouvelle oeuvre de fiction poétique, aux Éditions Triptyque, en librairie à Montréal le 30 janvier 2013 : « DÉCOUDRE LE DÉSASTRE suivi de L’ÎLE ANAPHORE »]
Question_de_terminologie.DU__SPONSOR__AU__COMMANDITAIRE_.vers.corr.pdf